Par Amanda Chong [english below] Traduit de l’anglais (Singapour) par Pierre Vinclair
.
.
.
I. Étude de tes yeux
.
Ce qu’était la mer avant d’apprendre son propre nom,
une volute hurlante, arrachée au ciel, luttant contre le bleu.
Et plus en profondeur, deux conques au tourbillon serré, endormies
sur une côte déchiquetée, mouillées de secrets. Les coques s’ouvrent en éventail,
se propagent dans les rochers qu’écrème un courant
écumant de lichen. Une femme trempe ses mains
dans l’eau mousseuse, caresse l’ébréchure d’une tasse de thé chinoise
jusqu’à ce que le cœur du vide habite ses doigts. La maison
enveloppe ses silences autour des douleurs de la femme,
et l’enroule. Tu te rappelles comment seul
le sommeil pouvait nous décoller ? Tu te tirais jusqu’à moi
dans la mi-ombre puis soudainement t’étreignaient
les étoiles. Tes paupières constamment scintillaient de savoir
et de ne pas savoir. Les lampadaires filent à travers
notre ville au crépuscule, une couture de lumière qui tremble
de mille futurs à la fois — nous aurions pu
nous installer dans tous.
.
.
22 juin 2018
.
.
À suivre…
.
.
A Lover’s Anatomy (1)
.
.
I. A study of your eyes
What the sea was before it learnt its own name,
a howling whorl torn from sky, wrestling with blue.
Deeper still, twin conches asleep on a jagged coast,
swirled tight, wet with secrets. The shells fan open,
ripple into boulders skimmed by a stream
frothing with lichen. A woman dips her hands
in suds, caresses a chip on a china teacup
till the nub of loss dwells in her fingers. The house
wraps its silences around the woman’s aches,
hemming her in. Remember the way only
sleep could unstitch us? You’d pull close to me
in half-shadow then suddenly, you were enfolded
in stars. Your eyelids, a constant flicker of knowing
and unknowing. Streets lamps thread through
our city at dusk, a seam of light quivering with
a thousand futures all at once—we could have
settled into every one.
.
.
22 June 2018
To be continued…