Chacun donne son corps à

Par Christophe Esnault

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L’horloge se brise quand le sens mollit et coule à gouttes lourdes et lentes vers la néantisation. Un scénario d’évasion mille fois étudié dans ses détails et précisions qui s’avère être en acte un rendez-vous manqué avec l’orangeraie. Une noix verte tombe sur un jouet d’enfant oublié à la pluie sale. Frontière indivisible entre la règle et l’art de l’exception. Dépossédée de sa naissance revendue à un tiers l’innocence repose en terrain miné. Hors le vice tout n’est que pourriture. Chiffrer les cadavres par simple jeu mémoriel. Savoir mettre à profit les ossements au service des jours savoureux. Ne pas disperser les crânes. Une mission secrète où l’on découvre sa disparition effective. Les étagères s’effondrent sur le poids de l’analyse. Utiliser pour pièce à conviction un poème volatile. Brandir l’indicible aux détracteurs. La plaie et le couteau soumissent à un cahier des charges très Franzien.  S’épanouir en ingérant un à un les clous rouillés. Prolonger la lutte en déplaçant l’escargot en danger endormi sur la marche d’un escalier. Court-circuiter l’apathie. Quand les mégaphones du vide happent la dernière symphonie et pistent les dernières âmes rescapées répondre d’une voix tellement convaincante (ou si peu) : « vivant ! »   

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Le gris périphérique gerce les sourires jusqu’au cœur historique de la ville. Simultanément quinze mille médecins nomment des maladies et signent des ordonnances. Arriver dans le hall d’une gare et monter dans le prochain train annoncé sur le tableau d’affichage. Le genou répond présent même quand la langue est jaune. Un gosse peste il veut les chaussures en vitrine. Un mégot est un trésor pour ce petit vieux-là. Entre fredonner et cracher un choix s’impose. Un couvre-feu  écologique. Sur des affiches des visages affables mais on comprend parfaitement les menaces. L’occurrence des mots incident et grave. Un four électrique à côté d’une poubelle. L’huile de vidange ne coule pas sur la chemise du soutenant. Suivre le chat noir pour retrouver les meilleures méthodes d’une enquête sociologique. Exhiber son plaisir à vivre entraîne des représailles. La majorité morale vous attrape au col. Dans un élan déterminé fuir main sur une porte verrouillée.

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Boxer seule rhétorique. Un infatigable désir de se blottir. Les mots blessent sans connaître le velours sous l’arcade sourcilière. L’âme de la fête sur Arte c’est un grand feu et une chanson de Janis. L’éducation catholique à coup de sabot. Sac de feuilles humides et un insecte piégé. Souffrir te va si bien et rend tes cheveux encore plus fins. La lenteur remplace la caméra qui remplace le corps de l’acteur. Capable de crever un panaris ou des ventres pour obtenir de si splendides zébrures. Atteindre le sommet puis photographier les nuages en dessous. L’éponge sale repousse l’amour et ses avatars au siècle prochain. Confondre défenestration et bol de riz. Maintenu au sol par des policiers en civil. Un ramasse bourrier dans les affres de l’abandon. Une matraque est une mascotte et une pom-pom-girl. L’enfant découvre un nid dans le bosquet et le duvet tout au fond est doux. Cette balafre a du cachet chez les pauvres qui ne peuvent plus en voir au cinéma. Se frotter sous les bras avec du papier de verre. Certaines filles vont rouler leurs hanches pour approcher ta peau de léopard. Souillure de se donner si peu. Pose ton œil dans sa bouche elle le sucera très doucement pour ne pas jouir trop vite.

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Parcouru par des soubresauts contraires aux limites biologiques. Un entrepôt de matériaux radioactifs oubliés. Une ligne de cocaïne et le surmoi tortionnaire opère. Les journalistes s’accordent pour dire que l’élu est extrêmement limité et évoquent à son propos les capacités intellectuelles d’un enfant de six ans. Dans le chapeau posé à terre personne ne jette de pièces. Au magasin percer le film plastique et mordre dans la viande crue parce qu’on a trop faim. Une oie sauvage repentie reçoit dans sa boîte aux lettres une convocation pour passer son permis de chasse. Un repris de justice méritant se voit attribuer un trophée par la commission de surendettement des ménages. Face à la coercition organiser la lutte en s’enchaînant à une grille. Pas le temps de lire ni de faire l’amour clame l’esclave salarié. Agir contre. Être le combat. Il pleut des injonctions et contraintes calées aux rythmes des grenades assourdissantes. Des drapeaux tricolores se substituent au langage. Sortir de la boue en caressant la femme aimée. 

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Le futur attaqué à coups de massue. Laisser mourir le nouveau né pour assurer la survie de ses ainés. Six cents photographies et pas certain qu’il y en ait une de réussie. Le diamant sautille sur le disque vinyle. Une joggeuse se perd en forêt. Le désespoir seul connaît l’heure du retour à une détresse moindre. Sur le billot de bois s’invite une chrysomèle. Bourreau de profession n’exclut pas les états d’âme et les tendinites à répétition. On n’utilise pas le mot chance pour désigner celui à qui la vie a été soufflée dans un incendie. Avec délicatesse est dépecé le lapin de clapier. Détruire est épuisant si l’on mesure tout ce qu’il reste à abattre. L’injustice exige seulement une naissance en pays émergeant ou pas. La tendresse d’une mère pour un sursitaire. Perdre son emploi et dégringoler. Dans le ciel un hélicoptère n’a même pas besoin de bombarder le territoire. Chacun donne son corps à l’économie de marché. 

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