.
.
– Le cercle est sans commencement ni fin, il frise.
– Mon corps ne semble plus rien dire alors.
– Oui, le dernier instant nous rappelle tout.
– Peu importe le calcul que je fais, les chiffres ne se soumettent jamais.
– Les heures, elles continuent de s’agglutiner.
– Il y a des ombres, des ombres de peu de chair, de peu de mots.
– Et ce mot : transmissible.
– Frôler la catastrophe, aller jusqu’où s’ouvre l’espace, jusqu’où se déploie la pensée.
– Trois chiens traversent la nuit sans laisse aucune. Ils courent sans bruit.
– Les regards savent creuser. Ils creusent des trous d’angoisse, des trous de joie.
– Au départ de mon corps, les enchevêtrements reçus, donnés, volés.
– S’appuyer sur la contre-lumière pour se recadrer. Et passer au travers.
– Comment ne pas devenir cette chose non rythmée, mise en vrac, toute de terreur ?
– Sentir mes paupières traversées par les lueurs du jour.
– Sans les mots, le temps file, ôté de ses instants, de ses steppes nuageuses.
– Tête au plancher, pieds au plafond pour retrouver ma circonférence tremblée.
– Savoir aboyer face à ce qui advient. Prendre forme. Accepter sa propre métamorphose.
– Devenir chien.
– Se rassasier par la peur qui existe entre toi et moi.
– En emplir sa bouche et la déverser en contre-bas.
– Petite mesure de silence.
– Pratiquer assidument le renversement.
– Assise, compter à l’ombre de ce qui n’est plus.
– Apprendre à se déplier, à déplier son regard, à déplier l’horizon et à guetter ce qui obstrue le monde.
– La terreur refait surface. Sans effondrement.
– Ce qui fait extrêmement peur, ce n’est pas l’infini, ni notre propre chaos, ni nos corps traversés mais l’ordonnancement absolu et implacable de l’univers.
– Ce qui fait peur c’est de voir un ordre au-dedans de ce chaos absolu.
– Et faire à chaque respiration, l’expérience de la catastrophe.
– Être encore et toujours catastrophiquement ici-bas. Appeler à la rescousse les petites mesures tremblées des feuilles.
– Décliner une par une l’identité de chaque arbre. Être chlorophylle.
– Guetter à nouveau foudres, éclairs et présages atmosphériques.
– Les choses se produisent à seule fin de signifier.
– Nos regards se croisent et se recroisent pour mieux s’entrelacer. Les nuages, eux, se heurtent afin de produire la foudre.
.
.
extrait inédit de Conjurations, météores, etc.
[Illustration : « Plage au clair de lune », tableau de Léon Spilliaert]
Magnifique. À lire, à relire…
J’aimeJ’aime