Avant d’apparaître (1/2)

par Fabrice Farre

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1. L’effraie regagne le tronc…

L’effraie regagne le tronc, le jardin se retourne.
Sur la terre, à la lumière des ombres zèbres,
les cailloux se détachent puis se remplissent,
les flaques sont sèches, tout à coup, l’aube
a franchi la frontière ; les lacs portent leur fond
où erre le regard, quel que soit le jour promis.
Au pied des ceintures sombres vues sans sommeil
poussent ces haies citadines dont les feuilles
donnent déjà l’étendue d’une macule : c’est en elle
que s’étend sans le corps la conscience de rester.

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2. L’arbre qui chante se tait…

L’arbre qui chante se tait à notre passage,
il est inutile de regarder le chemin pour rentrer :
nous voici libérés après le travail, méconnaissables.
Sur ton dos, tu portes les outils
de la semaine, noircis par la difficulté,
je les vois, les yeux fermés pendant la marche,
ils se taisent à peine, dans le ciel sur nos cils
dans la respiration, dans les yeux des abeilles
qui montent, montent jusqu’au lilas. Désirer le repos
au rythme de nos pas est une existence manquée.

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3. Ils crachent dans leurs mains, le ciel…

Ils crachent dans leurs mains, le ciel
est sur la tête. Demain poussera : c’est
l’éternité promise. Les maisons en bois
gardent les outils dans leur ventre, sur les pentes
des jardins, ils tiennent plus droits que des arbres
poussés par la roche fossile sous terre.
Hier mineur à la lampe du secret hivernal, aujourd’hui
majeur, l’été est incandescent.
Ils crachent dans leurs mains, pliés au sort,
demain poussera : c’est la promesse la plus proche.

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4. Lorsqu’il pleut…

Lorsqu’il pleut, les lignes ne sont plus les mêmes
l’horizon croise une forêt dont chaque arbre abstrait
ne répond à aucun autre.
Le lieu n’est visible qu’en pensée.
On ne quitte pas sa chaise, on se perd
dans cet élan de la chute d’où l’on ressort vivant.
La vie est maintenue
La chanson d’eau couvre le silence
et le silence est continu entre chaque regard
errant sur les bords de lumière.

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5. Je m’enfonce dans l’herbe…

Je m’enfonce dans l’herbe, la terre
est plus haute que moi. J’entends battre
le cœur régulier d’une cavalerie de joie. Je touche
aux racines sous nos corps passagers.
L’ombre est mouillée tout autour de toi,
l’herbe l’absorbe.
Es-tu à l’abandon dans le galop sourd
prêté à la mort. Avec le plus beau sourire, tu flottes
dans le ciel, les nuages s’approchent, comme eux
j’ai une pensée aussi vagabonde du corps délesté.

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À suivre…

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